À l’occasion de la Journée internationale de la langue maternelle, l’IFEF a organisé une projection du court-métrage documentaire J’apprends si je comprends. Réalisé par Solidarité Laïque avec le soutien de l’IFEF, notamment dans le cadre du projet École et langues nationales (ELAN), ce film tourné au Burkina Faso, au Mali, en République démocratique du Congo et au Sénégal met en lumière les bénéfices de l’enseignement bi-plurilingue.
La projection a été suivie d’un débat interactif réunissant experts, étudiants, enseignants et partenaires du secteur éducatif. Cet échange a permis d’expliciter les enjeux du film, de partager l’expérience du Sénégal en matière d’enseignement bi-plurilingue – aussi bien du point de vue institutionnel que de la recherche – et de mettre en avant l’accompagnement de l’IFEF dans ce domaine à l’échelle de la Francophonie.
Temps forts du débat
Cet événement a été une opportunité unique de rassembler les acteurs du secteur de l’éducation pour discuter des avancées et débattre des défis restants. Les panélistes ont insisté sur l’importance d’un enseignement ancré dans les réalités linguistiques locales.
« 𝙅’𝙖𝙥𝙥𝙧𝙚𝙣𝙙𝙨 𝙨𝙞 𝙟𝙚 𝙘𝙤𝙢𝙥𝙧𝙚𝙣𝙙𝙨 est un projet cinématographique et de recherche scientifique collectif. Il invite les spectateurs à comprendre pourquoi il est urgent de donner à tous les jeunes enfants le droit d’accéder aux apprentissages dans une langue qu’ils comprennent. Sans prise en compte de ce facteur linguistique, les objectifs liés à la qualité de l’école ne pourront pas être atteints »
– Christelle Mignot, auteure du film
« La recherche universitaire est indispensable pour qu’on puisse arriver à enseigner une langue pratiquement. »
– Alioune Ngoné Seck, linguiste et enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop
« La question du pourquoi est dépassée. Les études et recherches ont prouvé maintes fois que les élèves bilingues performent mieux que les élèves des écoles classiques monolingues. Il faut maintenant aller vers la pérennisation systémique, vers une réforme éducative bilingue pleine et entière. »
– Bodiel Fall, coordonnatrice du programme ELAN
« Apprendre dans une langue que l’on comprend est essentiel : le Modèle harmonisé d’enseignement bilingue au Sénégal (MOHEBS), en faisant cohabiter judicieusement les langues nationales à côté du français, est un levier d’amélioration de la qualité des apprentissages fondamentaux à l’école. ».
– Papa Ndiaga Diome, inspecteur de l’Enseignement élémentaire au sein du ministère de l’Education nationale du Sénégal
Des recommandations issues des discussions
Les discussions ont permis de dégager plusieurs recommandations clés pour renforcer l’intégration des langues nationales dans les systèmes éducatifs :
- Elaborer des stratégies nationales globales de la réforme éducative bi-plurilingue dans une vision systémique et adopter des politiques linguistiques éducatives bi-plurilingues explicites pour une appropriation nationale effective et durable
- Établir un continuum éducatif bi-plurilingue au moins pour le cycle fondamental (12 ans) afin d’assurer une acquisition approfondie des savoirs et une place importante aux langues nationales tout au long du parcours scolaire
- Former les enseignants dès la formation initiale à la maitrise des règles d’écriture des langues nationales et à la didactique bi-plurilingue pour leur donner les outils nécessaires à un enseignement efficace
- Favoriser la recherche scientifique au service de la réforme éducative et alignée aux attentes des communautés
- Valoriser les langues nationales pour déconstruire les préjugés et promouvoir leur usage dans tous les milieux éducatifs
- Mobiliser les ressources techniques nationales nécessaires et un budget propre pour garantir la pérennisation de la réforme éducative bi-plurilingue dans les pays
- Mettre en place des politiques linguistiques éducatives bilingues avec un budget propre, pour assurer une application efficace et durable des réformes.
La langue maternelle, un levier pour la réussite scolaire
Cette rencontre a rappelé que la langue maternelle est bien plus qu’un simple moyen de communication : elle est un outil essentiel d’apprentissage et un vecteur de réussite scolaire. Construire une éducation ancrée dans les réalités linguistiques des élèves, c’est leur donner les meilleures chances de comprendre, d’apprendre et de s’épanouir.




A propos du film
En Afrique francophone, la langue d’enseignement – souvent le français – est bien souvent absente du quotidien des élèves avant leur entrée à l’école, où seul 1 enfant sur 5 reçoit un enseignement dans sa langue maternelle. Une barrière linguistique qui freine les apprentissages et impacte directement les performances scolaires.
A ce jour, les écoles publiques d’Afrique francophone subsaharienne font face à des défis importants concernant la mise en place du bilinguisme. Dans de nombreux établissements, l’intégration de réformes bi-plurilingues peine à se déployer pleinement en raison de divers obstacles. Il devient crucial de définir un modèle de bilinguisme adapté aux réalités des salles de classe, en tenant compte des langues locales et du français, afin d’offrir un enseignement plus inclusif et efficace. Accompagner les enseignants dans l’adoption de pratiques pédagogiques intégrées bi-plurilingues s’avère essentiel pour améliorer la qualité de l’apprentissage. Par ailleurs, il est aussi important de sensibiliser la population aux avantages de l’enseignement bilingue, pour qu’elle en saisisse pleinement les bienfaits, tant sur le plan linguistique que cognitif et affectif.
Le film « J’apprends si je comprends » tente de répondre à ces enjeux en proposant des solutions adaptées aux besoins spécifiques des élèves et des enseignants. Il porte sur l’utilisation conjointe des langues premières des enfants et du français dans les salles de classe du Burkina Faso, du Mali, de la République démocratique du Congo et du Sénégal.
Le projet « J’apprends si je comprends » est réalisé par l’association Solidarité Laïque, avec un soutien technique et financier de l’Institut de la Francophonie pour l’éducation et la formation (IFEF) dans le cadre du programme Ecole et langues nationales (ELAN). L’IFEF est un organe spécialisé de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).
« J’appends si je comprends »